France Culture / Femme, vie, liberté : chroniques d’une révolution en Iran
Le 17 août 2023, Chowra Makaremi, invitée des Matins d’Eté de France Culture (présenté par la journaliste Julie Gacon)
“La révolte en Iran, déclenchée par la mort tragique de Jina Masha Amini, le 16 septembre 2022, a engendré un mouvement de protestation d’envergure nationale. La réaction gouvernementale a été sévère avec des morts et des arrestations massives. Qu’en est-il de la révolte un an après ?
- Chowra Makaremi – Anthropologue, chargée de recherche CNRS à l’IRIS, spécialiste de l’Iran, de la violence et des migrations
Près d’un an s’est écoulé depuis le début de l’immense soulèvement populaire et féministe provoqué par la mort de la jeune Jina Marsa Amini, 22 ans, arrêtée par la police des mœurs parce que son voile ne lui couvrait pas assez les cheveux. Conduite dans un centre de rééducation et morte trois jours plus tard, le 16 septembre 2022. Alors, que reste-t-il de la révolte ? Comment lire aujourd’hui cette irruption spontanée de colère ?
En l’inscrivant dans une histoire plus longue, l’histoire du pouvoir et de la résistance en Iran, notre invitée, l’anthropologue Chowra Makaremi, raconte jour après jour et presque heure par heure cette révolte, et fait défiler sur son écran des photos, des vidéos, des voix et des fragments de lutte. Elle écrit “Femme ! Vie ! Liberté ! Échos d’un soulèvement révolutionnaire en Iran”, à paraître aux éditions La Découverte, en septembre 2023.
Un mouvement révolutionnaire inédit
“C’est un mouvement révolutionnaire, commente Chowra Makaremi. Il est révolutionnaire parce qu’il demande le changement du régime, et toutes les différentes franges de la population le demandent, ce qui est inédit”. Contrairement aux révoltes précédentes – du mouvement étudiant de 1999 à la révolte des classes populaires en 2017-2019 en passant par le mouvement vert de 2009 – “on a une alliance de tous ces différents mouvements à l’automne 2022. Or, la raison pour laquelle il y a alliance, c’est justement le discours qui le porte, c’est-à-dire une demande très claire de changement de régime.”
Ôter le voile : la joie contre la peur
Au centre de ce mouvement révolutionnaire, un geste a beaucoup circulé, au point d’en devenir un symbole, même pour les hommes, celui du retrait du voile. “Les hommes applaudissent les femmes quand elles enlèvent leur voile, souligne l’anthropologue. Elles sont applaudies parce que les hommes n’ont pas, quant à eux, de symboles pour s’opposer aussi frontalement au pouvoir.”
Le rejet du voile, est avant tout le rejet du régime de terreur et des nombreuses lignes rouges à ne pas franchir instaurées par la République islamique. “Quand les femmes enlèvent leur voile, elles ne le font pas dans la rage ou dans la peur. Il y a une joie, une créativité. Cette joie là vient précisément casser la peur qui a été très longtemps un ciment qui a tenu la société iranienne.”
Le mouvement, un an après
La révolte a gagné le pays entier, donnant lieu à une rare solidarité interethnique dans un contexte où le racisme d’Etat et la xénophobie sont promus par le régime. S’il est difficile de mesurer la persistance de la résistance organisée, du fait de l’anonymat des révoltés, on sait que le mouvement a permis de “rebattre les cartes et d’ouvrir les débats, les discussions sur des champs et dans des perspectives qui n’étaient pas présentes avant l’automne 2022, et notamment penser l’après République islamique”, explique Chowra Makaremi.”
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Off-Site (August 22, 2023). France Culture / Femme, vie, liberté : chroniques d’une révolution en Iran. Off-Site. Retrieved November 18, 2025 from https://doi.org/10.58079/sifn


